Avant tout : quelle est la définition d’une estimation immobilière ?
Pour bien appréhender ce qui va suivre, il est important de comprendre ce qu’est réellement une estimation immobilière.
Une estimation immobilière est le résultat du travail d’un évaluateur dont l’objectif est de déterminer avec précision la valeur d’un bien immobilier à un instant T donnant lieu à un accord entre un acheteur et un vendeur dans un délai raisonnable.
Une estimation s’obtient à partir de différentes méthodes de calcul choisies en fonction de la spécificité du bien à évaluer. La qualité d’une estimation immobilière dépend principalement des capacités de l’évaluateur à choisir la ou les méthodes les plus pertinentes, mais aussi à choisir des données fiables et connaître les tendances du marché de l’immobilier au moment de son évaluation.
La meilleure estimation est celle d’un évaluateur qui saura vous démontrer que son prix est le plus juste.
La restitution d’une estimation s’effectue via un avis de valeur ou un rapport d’expertise.
L’avis de valeur n’a qu’une valeur informative. Il est généralement rédigé par un conseiller en immobilier (un agent immobilier dans le cadre d’une vente ou un chasseur immobilier dans le cadre d’un achat).
Une expertise immobilière est généralement rédigée par un expert en immobilier, qui, en remettant son rapport, engage sa responsabilité civile professionnelle. Un rapport d’expert immobilier est donc opposable et peut être utilisé devant les tribunaux.
Quels sont les documents à préparer pour une estimation immobilière ?
Pour qu’une estimation soit la plus précise possible, il est important de fournir à l’évaluateur toutes les informations dont vous disposez sur votre bien. Plus cette liste de documents sera complète, plus l’estimation sera fine, car l’évaluateur pourra détecter tous les critères qui impacteront positivement ou négativement le prix du bien.
Ainsi, avant même de faire estimer votre bien, nous vous conseillons de préparer les documents suivants :
- Votre titre de propriété avec son prix
- Les 3 derniers PV d’assemblée générale de votre copropriété
- Votre dernier appel de charges
- La taxe foncière
- Les diagnostics immobiliers de votre bien
- La superficie Carrez pour un bien en copropriété
- La liste et le montant des travaux que vous avez réalisés dans votre bien (idéalement avec les factures)
- Le règlement de copropriété de l’immeuble et tous ses modificatifs
- Le carnet d’entretien de l’immeuble
- Et tous les éléments qui vous paraissent importants concernant votre bien pouvant potentiellement impacter son prix
De nombreux documents sont généralement disponibles sur l’intranet de votre syndic donc n’hésitez pas à aller les récupérer. Pour vous connecter à votre espace, il vous suffit de consulter votre dernier appel de charges où généralement se trouvent votre identifiant et mot de passe. Une fois votre dossier le plus complet possible, communiquez tous les éléments à votre évaluateur. Au-delà de lui faire gagner un temps précieux, vous en gagnerez également, car vous devrez lors de la vente de votre bien communiquer tous ces éléments à votre notaire. Vous réduirez ainsi le délai de signature d’une éventuelle promesse, ce qui limitera les risques de rétractation de votre acquéreur.
Une estimation doit-elle être net vendeur ou honoraires d’agence inclus ?
Tout expert immobilier vous dira que la valeur d’un bien doit se calculer en net vendeur. C’est tout à fait juste puisque ce que nous voulons estimer est sa valeur intrinsèque. Les honoraires d’agence qui s’ajoutent au prix du bien ne font effectivement pas partie de la valeur du bien, mais cette approche est théorique. Pourquoi ? Car le prix réel d’un bien est avant tout celui sur lequel s’entendront un acheteur et un vendeur. Dans la grande majorité des cas, le prix affiché est celui que devra payer l’acheteur final. Si le bien est commercialisé par une agence, les honoraires y seront donc inclus. Concernant les particuliers qui vendent leur bien en direct, leur prix est bien souvent égal, et même parfois supérieur, à celui qu’aurait pu proposer un agent immobilier. Par conséquent, l’estimation immobilière d’un bien doit se calculer à partir de données de prix incluant les honoraires d’agence. Une fois obtenu, il sera alors facile, notamment pour un vendeur particulier, de calculer le prix net vendeur qu’il obtiendra une fois son bien vendu en défalquant le montant des honoraires de l’agence à qui il l’aura confié.
Quelles méthodes de calcul sont utilisées en estimation immobilière ?
Méthode par comparaison : la plus connue et la plus utilisée
La méthode par comparaison, ou la méthode des comparables, est celle qui est la plus utilisée tant par les particuliers que par les professionnels de l’immobilier. Le principe est de déterminer la valeur d’un bien en fonction d’autres biens présentant les mêmes caractéristiques (localisation, type d’immeuble, étage, agencement, état général ou encore état de la copropriété). Cette comparaison se fait à la fois sur la base des prix des biens actuellement en vente, mais aussi des biens vendus. Même si, sur le principe, cette méthode semble relativement facile à appliquer pour se faire une idée précise d’un bien, lorsque l’on rentre dans le détail, elle devient nettement plus complexe et risquée qu’on ne l’imagine. Nous vous expliquons pourquoi dans la suite de cet article.
Méthode par les revenus : très utilisée par les investisseurs
Cette méthode, aussi connue sous le nom de méthode par le rendement, est principalement utilisée dans le cadre d’un investissement locatif. Elle consiste à déterminer le prix d’un bien en fonction des revenus locatifs qu’il peut générer. Elle est tout particulièrement adaptée pour l’estimation des biens destinés principalement à la location comme les studios ou les deux-pièces.
Méthode par la valeur antérieure : utile, mais peu précise
Cette méthode permet de déterminer la valeur d’un bien en fonction de l’évolution du marché l’immobilier dans son secteur depuis sa dernière mutation (la dernière fois qu’il a été vendu). À ceci s’ajoutent les éventuels travaux que le propriétaire aurait pu réaliser tout en y appliquant éventuellement une obsolescence des travaux réalisés. Même si cette méthode est intéressante sur le papier, elle comporte de nombreux biais qui impliquent d’effectuer une comparaison avec les autres méthodes : ce n’est donc pas une méthode d’estimation principale. En effet, le prix d’achat de l’ancien propriétaire qui aura pu être sous-payé ou surpayé pourra être un des facteurs de déviation importants de cette méthode, au même titre que la précision de la donnée sur l’évolution des prix à une adresse précise.
Méthode par la vétusté : pertinente pour les biens avec travaux
Cette méthode, aussi appelée méthode par les coûts, est très utilisée pour des biens nécessitant des travaux. Elle consiste à déterminer le prix d’un appartement ou d’une maison en fonction de l’état de rénovation dans lequel il ou elle se trouve. En d’autres termes, l’objectif est de déterminer le prix d’un bien en partant de son prix maximum s’il était en parfait état de rénovation lors de sa vente et ensuite de lui soustraire le coût estimé des travaux. Vous vous êtes certainement déjà dit avant de faire une offre : « Mais si je rajoute le prix des travaux au prix de vente, ce sera trop cher ! » Eh bien sachez que cette méthode est parfaitement représentative de la mécanique intellectuelle de tous les acheteurs lorsqu’il s’agit de faire une offre sur un bien nécessitant des travaux.
Les autres méthodes d’estimation existantes sur le marché
De nombreuses autres méthodes permettent d’estimer un bien immobilier comme la méthode hédoniste utilisée pour déterminer sa valeur vénale dans le cadre d’une expertise immobilière, mais aussi la méthode sol et construction lors de l’évaluation d’une maison, la méthode discounted cash flow notamment pour l’estimation d’un immeuble, et la liste est longue !
Comme vous l’imaginez, à partir de chaque méthode, vous obtiendrez un prix différent. Tout l’art sera alors d’évaluer l’importance que vous donnerez à chaque méthode et la méthode que vous utiliserez en fonction des données de marché dont vous disposez et du type de bien à estimer. Seule vos connaissances immobilières vous permettront de réaliser cette pondération entre les méthodes.
Cela étant dit, le plus important est d’utiliser les bonnes données pour réaliser une estimation fiable et objective, ce que nous allons à présent étudier.
Quelles données prendre pour une bonne estimation ?
Les clés d’une estimation fiable d’un bien résident dans la qualité des informations que vous utiliserez pour la réaliser. Si vos données sont erronées, votre estimation sera forcément fausse ! C’est pourquoi il faudra retraiter certaines données récupérées sur Internet ou ailleurs avant de les utiliser pour votre valorisation.
Les prix des biens actuellement en vente : attention à la négociation
Comme vous le savez, les prix que vous trouvez sur les sites d’annonces immobilières sont des prix affichés et non des prix après négociation. Si vous les utilisez sans les retraiter, il y a de fortes chances que l’estimation de votre bien soit surévaluée. Afin de réaliser une analyse comparative précise, il vous faudra donc appliquer à ces valeurs une décote estimée de négociation, ce qui permettra de déterminer le prix réel estimé après négociation.
Mais comment trouver des biens immobiliers comparables au bien que vous souhaitez vendre ou acheter ? Ce premier travail est assez simple. Il vous suffit d’aller consulter les sites d’annonces en ligne (SeLoger, PAP, Leboncoin par exemple) et de sélectionner les biens qui vous semblent comparables en termes de surface, de type de construction et qui se vendent dans le secteur de votre bien. À partir de cet échantillon, vous devrez détecter l’adresse précise des biens pour ne sélectionner que ceux qui se trouvent à proximité du bien à estimer. Ceci est assez complexe, car peu d’agences ou de particuliers donnent cette information. Une fois cet échantillon déterminé, vous devrez sélectionner uniquement les biens qui présentent les mêmes caractéristiques que le vôtre en termes d’étage, d’état de rénovation… Ce n’est qu’une fois votre échantillon précis réalisé que vous pourrez enfin retraiter les chiffres comme nous l’avons vu précédemment.
Les prix des biens vendus : attention aux frais d’agence
La plupart des prix provenant de sources de données de biens vendus sont affichés en net vendeur. Pour déterminer le prix HAI après négociation d’un bien à vendre sur le marché, il vous faudra donc ajouter les honoraires d’agence estimés. Dans certaines bases de données, le montant du mobilier peut être également défalqué du prix final qui vous est communiqué. Il faudra donc potentiellement le rajouter pour affiner votre estimation.
La date de mise à jour des prix est primordiale pour une bonne estimation
Pour illustrer nos propos, prenons l’exemple des données des notaires. Leurs chiffres sont publiés trimestriellement. Dans un marché très actif, les prix peuvent évoluer assez rapidement en quelques mois. Ainsi, si la dernière publication des notaires date de 3 mois, vous risquez soit de sous-évaluer le bien si le marché est porteur ou de le surévaluer si les prix baissent dans l’intervalle. Le problème est le même si vous décidez de prendre les données de la base DVF (Demande de Valeurs Foncières) publiées par l’État. Cette base publie les transactions réalisées en France avec 6 mois de décalage. Si vous ne retraitez pas ce biais, votre estimation risque d’être erronée. Il vous faudra par conséquent actualiser ces chiffres pour obtenir une valeur actuelle qui vous servira de base de calcul.
Attention à l’état d’un bien sur les sources de données de biens vendus
Les bases de données des biens vendus sont généralement pauvres en descriptions. En effet, il est par exemple difficile de savoir si le bien était ou non en bon état lors de sa vente. Pour affiner votre estimation, il est nécessaire de disposer de bases de données professionnelles pourvues d’un historique d’annonces immobilières (n’étant donc plus disponibles sur Internet) qui vous permettent de savoir sur la base des photos des biens vendus s’ils étaient ou non en bon état.
Les valeurs locatives : attention aux charges et aux prix affichés
Ici aussi, les prix des annonces de biens en location peuvent être surévalués. De plus, certains sont affichés charges comprises ou hors charges. Vous pouvez également obtenir les valeurs locatives dans un secteur via des bases de données, mais vous devrez également les corriger en fonction du type d’estimation que vous utiliserez pour évaluer votre bien.
Les coûts de rénovation : dépendent du lieu du bien à estimer
Si vous souhaitez utiliser la méthode par la vétusté pour estimer un bien, vous devrez estimer le plus précisément possible les travaux à réaliser pour que le bien soit considéré comme étant sans travaux pour la majorité des acquéreurs. Dans ce cas, vous devrez valider votre estimation avec un artisan pour ne pas trop le décoter ou surcoter. Le prix des travaux peut varier d’un secteur à l’autre. En effet, à Paris par exemple où le fait de se garer est très difficile pour un artisan, le prix des travaux sera nettement plus élevé qu’en région où le prix des matériaux peut être moins cher et où les artisans ne sont pas confrontés à des problèmes de livraison de matériel. Le coût de la rénovation énergétique pour améliorer le DPE devra également être pris en compte.
L’évolution des prix du marché à une adresse : des données peu précises
Si vous souhaitez utiliser la méthode par la valeur antérieure, vous devrez estimer ou trouver l’évolution des prix à une adresse donnée la plus exacte possible. Malheureusement, il est aujourd’hui très difficile d’obtenir cette donnée gratuitement. C’est en partie pour cette raison que cette méthode doit être utilisée avec du recul.
En conclusion, ce qui fera la différence lors de l’estimation d’un bien sera avant tout la qualité des données que vous aurez utilisées. La moindre erreur pourra en effet complètement changer le résultat de votre estimation. Voici la liste des questions à vous poser pour corriger les chiffres utilisés :
- Les valeurs sélectionnées sont-elles HAI ou net vendeur ?
- Les prix sont-ils avant ou après négociation ?
- De quand datent les données utilisées ?
- Le mobilier est-il intégré ou non dans les données que j’utilise ?
- Les logements que je compare sont-ils vraiment comparables à mon bien, notamment en termes d’adresse ?
- Les données d’évolution du marché sont-elles pertinentes ?
- Le coût estimé des travaux de mon bien est-il précisément évalué ?
Ce n’est qu’une fois ces données collectées et retraitées que vous pourrez calculer une fourchette des prix du marché à l’adresse précise du bien estimé.
Qu’est-ce qu’une fourchette des prix de marché à une adresse précise ?
Une fourchette de marché représente le prix maximum, médian et minimum d’un bien à une adresse donnée. À titre d’exemple, nous pouvons imaginer que le prix minimum sera celui d’un appartement à une adresse précise pour un appartement au rez-de-chaussée, face aux poubelles, à rénover et dans le noir quasi complet. Inversement, le prix maximum estimé sera celui d’un bien à la même adresse, situé au dernier étage, avec ascenseur, en parfait état et bénéficiant d’un environnement calme. Pour obtenir cette fourchette, comme nous l’avons expliqué précédemment, vous devrez retraiter toutes vos données afin de les mettre sur une base comparable. Une fois ce travail réalisé, il sera alors nécessaire de prioriser telle ou telle source pour enfin obtenir une fourchette de marché définitive.
Vient ensuite l’analyse de la qualité de votre bien à estimer pour le positionner sur cette fourchette de marché.
Comment estimer la qualité d’un bien immobilier avec précision ?
La qualité de votre bien, et donc le regard global que portera un acheteur sur celui-ci avant de l’acheter, dépendra de ses caractéristiques. Ainsi, chaque critère a une importance plus ou moins élevée selon les acheteurs. À titre d’exemple, l’agencement d’un appartement aura plus d’importance que le fait qu’il dispose d’une alarme. Pour déterminer la qualité d’un bien, il est donc nécessaire de connaître l’importance de chaque critère au regard des acheteurs pour ensuite déterminer avec précision sa qualité et ainsi positionner le bien sur la fourchette de marché calculée précédemment. À titre d’exemple, chez Peter Jorgensen Consulting, nous analysons via notre algorithme plus de 80 critères pour déterminer la qualité intrinsèque d’un bien.
Une fois ce calcul réalisé, il est alors possible de déterminer avec précision le positionnement du bien estimé sur la fourchette de marché et ainsi fixer avec objectivité son prix final. Attention toutefois ! Le travail ne s’arrête pas là, car un bien est composé de deux prix à minima : le prix de marché et le prix de présentation dont nous allons parler maintenant.
Quelle différence entre le prix de marché et le prix de présentation ?
Le prix de marché est celui pour lequel en théorie un acheteur et un acquéreur se mettent d’accord dans un délai raisonnable. Le prix de présentation est celui affiché dans une annonce immobilière qui est souvent supérieur au prix de marché afin de laisser une marge de négociation. La valeur subjective est l’écart entre le prix de présentation et le prix de marché. Ainsi, une fois le prix de marché déterminé, c’est-à-dire ce que vous estimez être le « vrai » prix du bien, il est alors important de déterminer le prix maximum auquel le bien devra être présenté aux futurs acquéreurs. Évaluer ce prix est une opération délicate, car cela est subjectif et dépend essentiellement des conditions de marché lors de la mise en vente. Si la demande est forte et qu’en plus, le produit est rare, il sera possible de le présenter à un prix nettement supérieur à son prix de marché. En revanche, si la demande est faible et que vous souhaitez vendre vite votre bien, il sera préférable de donner un prix d’affichage proche du prix de marché. Tout dépendra du marché et de vos obligations en termes de durée de vente. Le plus important est de ne pas dépasser ce prix maximum pour éviter une surestimation du bien qui pourra être fatale pour sa vente ou pour son acquisition.